Lexique : Base de données
« Recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ».
- Article L. 112-3, al. 2 du Code de la propriété intellectuelle
Les bases de données sont souvent présentées comme des créations informationnelles en ce qu'elles contiennent des éléments qui peuvent être qualifiés de données ou d'informations.
Cette protection est indépendante de l'application du droit d'auteur :
L’objectif du droit sui generis est de protéger l’investissement qui a été réalisé en vue de la production et de la gestion de la base de données. Il ne permet pas de protéger l’acte créatif lui-même comme c'est le cas en droit d'auteur.
Le producteur d'une base de données bénéficie d'une protection du contenu de la base lorsque la constitution, la vérification ou la présentation de celui-ci atteste d'un investissement financier, matériel ou humain substantiel.
- Article L. 341-1 du Code de la propriété intellectuelle
L'investissement doit tout d'abord être substantiel (critère apprécié souverainement par les juges du fond). L'investissement peut être évalué même si la base de données est ensuite mise à disposition gracieusement.
Ensuite, l'investissement doit porter sur la constitution, la vérification ou la présentation du contenu de la base.
Concernant la constitution de la base, c'est-à-dire la collecte des données, l'investissement ne comprend pas l'effort de création des données.
Concernant la vérification des données, la jurisprudence de la Cour de justice de l'Union européenne retient que seuls les moyens consacrés, en vue d'assurer la fiabilité de l'information contenue dans ladite base, au contrôle de l'exactitude des éléments recherchés, lors de la constitution de cette base ainsi que pendant la période de fonctionnement de celle-ci, à l'exclusion des moyens consacrés à des opérations de vérification au cours de la phase de création de données.
Concernant la présentation des données, la Cour affirme que pour le calcul de l'investissement, peuvent être pris en compte l'agencement systématique ou méthodique des données, l'organisation de leur accessibilité individuelle et la vérification de leur exactitude tout au long de la période de fonctionnement de la base.
Quid lorsque la base de données ne remplit pas les conditions d'investissement substantiel ?
Lorsque la base de données ne remplit pas la condition d'investissement substantiel, elle n'est pas protégée par le droit sui generis.
Le producteur d'une base de données peut cependant limiter l’accès aux données par le biais du contrat.
Cela produit un effet qui peut s'avérer intéressant. En effet, le droit sui generis des bases de données prévoit des exceptions au droit sui generis au-delà desquelles les titulaires du droit ne peuvent aller, y compris au moyen d’un contrat.
Ainsi, lorsque les bases de données ne sont pas protégées au titre d’un droit de propriété intellectuelle (droit d’auteur ou du droit sui generis des bases de données), les Conditions générales d’utilisation peuvent contenir des règles plus strictes que si les bases de données concernées étaient protégées par un droit de propriété intellectuelle en prévoyant des exceptions moins larges que celles prévues par la loi.
Au regard de la jurisprudence, le détenteur des données et de la base, non protégeable par un droit de propriété intellectuelle, qui les contient peut donc en verrouiller l’accès et l’utilisation par contrat .
Il demeure que le droit de la propriété intellectuelle présente cependant un avantage majeur par rapport au contrat. Contrairement au contrat, il est opposable à tous (effet absolu). Le contrat n’est en revanche opposable qu’au cocontractant (effet relatif). Selon le principe de l’effet relatif des contrats, les obligations découlant d’un contrat n’engagent en effet que les parties qui l’ont conclu.
Autrement dit, un contrat ne lie que les cocontractants, tandis que le droit de la propriété intellectuelle, notamment le droit sui generis des bases de données, s’impose à tous sans exception et permet ainsi d’agir en justice si le droit de propriété intellectuelle n’est pas respecté, par le biais de l’action en contrefaçon.
Le titulaire du droit sui generis est le producteur de la base de données. Il s'agit de la personne qui prend l'initiative et le risque des investissements correspondants. Le producteur est donc celui qui a engagé les moyens humains, matériels ou financiers nécessaires à la réalisation de la base de données.
Il peut s’agir d’une personne physique ou d’une personne morale de droit privé ou de droit public.
Bien que la loi ne le précise pas, le droit peut être détenu par plusieurs personnes. La base de données se trouve alors dans une situation de copropriété. Cette situation est très fréquente dans le domaine de la recherche scientifique, lorsque le projet de recherche est développé dans le cadre d'un partenariat public-privé et que la valorisation des résultats de la recherche prend la forme d'une ou plusieurs bases de données.
Afin de ménager la preuve de son droit, le producteur a la possibilité de déposer une base de données à l’Agence de Protection des Programmes (APP) par exemple, pour prendre acte de l’antériorité et de la paternité de la production des connaissances en cas d’éventuels débats.
Le droit sui generis confère au producteur un droit exclusif et opposable à tous pour une durée de quinze ans à compter de l'achèvement de la fabrication de la base de données. Lorsque la base de données a fait l'objet d'un nouvel investissement substantiel, la durée de protection est prorogée de quinze ans.
« Les droits prévus à l'article L. 342-1 prennent effet à compter de l'achèvement de la fabrication de la base de données. Ils expirent quinze ans après le 1er janvier de l'année civile qui suit celle de cet achèvement.
Lorsqu'une base de données a fait l'objet d'une mise à la disposition du public avant l'expiration de la période prévue à l'alinéa précédent, les droits expirent quinze ans après le 1er janvier de l'année civile suivant celle de cette première mise à disposition.
Toutefois, dans le cas où une base de données protégée fait l'objet d'un nouvel investissement substantiel, sa protection expire quinze ans après le 1er janvier de l'année civile suivant celle de ce nouvel investissement ».
Le droit sui generis des bases de données confère au producteur le droit d’interdire certaines formes d’extraction et de réutilisation de la base de données à condition que l'extraction ou la réutilisation concerne la totalité ou une partie qualitativement ou quantitativement substantielle de la base de données.
Il en est de même si l’extraction ou la réutilisation se manifeste de façon répétée et systématique. L’extraction ou la réutilisation pourra ainsi être sanctionnée même si elle porte sur une partie non substantielle de la base.
« Le producteur de la base de données peut interdire :
1° l’extraction par transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support, par tout moyen et sous toute forme que ce soit.
2° la réutilisation, par la mise à la disposition du public de la totalité ou d’une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu’en soit la forme.
Ces droits peuvent être transmis ou cédés ou faire l’objet d’une licence.
Le prêt public n’est pas un acte d’extraction ou de réutilisation ».
« Le producteur peut également interdire l'extraction ou la réutilisation répétée et systématique de parties qualitativement ou quantitativement non substantielles du contenu de la base lorsque ces opérations excèdent manifestement les conditions d'utilisation normale de la base de données ».
« Transfert permanent ou temporaire de la totalité ou d’une partie substantielle du contenu d’une base de données sur un autre support par quelque moyen ou sous quelque forme que ce soit ».
- Article L. 342-1, 1° du Code de la propriété intellectuelle
La Cour de justice de l’Union européenne retient une interprétation relativement large de la notion d’extraction conforme à l’objectif poursuivi par le législateur européen.
Ainsi, l’extraction automatisée d’un contenu, ou web scrapping, intégralement reproduit sur un site tiers constitue une extraction au sens de la loi.
Toutefois, en matière de recherche scientifique, une exception au droit sui generis a été consacrée par la Directive n° 2019/790 autorisant la fouille de textes et de données (Text and Data Mining). La directive a été transposée en droit français. – Article L. 122-5-3 du Code de la propriété intellectuelle
« La mise à la disposition du public de la totalité ou d'une partie qualitativement ou quantitativement substantielle du contenu de la base, quelle qu'en soit la forme ».
- Article L. 342-1, 2° du Code de la propriété intellectuelle
Le titulaire des droits sur la base de données a le droit d’interdire la réutilisation du contenu de sa base de données.
La Cour de justice de l'Union européenne retient également une définition relativement large de la notion de réutilisation.